Le samedi vaqué, une chance pour les bibliothèques
1 mars 2009
Les bibliothécaires se plaignent. La suppression récente de deux heures hebdomadaires de classe à l’école maternelle et primaire a eu un effet imprévu : la chute du nombre de visites de classes. La perte du samedi matin oblige les enseignants à annuler des activités et à limiter les déplacements. L’activité bibliothèque a été la première touchée. Si les enseignants gagnent du temps en supprimant les visites, alors que leur programme les y incite, c’est qu’ils peuvent se passer de ce service. Et c’est là justement le problème. Après trente années de pratique, l’accueil des classes est encore « une prestation à caractère épisodique de services et un prêt d’ouvrages plutôt qu’une éducation de lecteur à proprement parler » *
Cette désaffection est donc l’occasion pour les bibliothécaires de revoir les accueils de classes, de passer d’un service « épicerie » à un service « traiteur ». Avec cette nouvelle approche du partenariat, les enfants ne viennent plus, entre les mathématiques et le sport, emprunter chacun un livre au hasard pour une lecture individuelle hypothétique, ni participer à un atelier pédagogique, prolongement de l’école. Ils sont invités (par carton) à participer à un « dégustalivres » soit à la bibliothèque, soit à l’école avec « Une dame du livre » comme celle évoquée dans l’album éponyme publié en février 2009 chez Syros. Les quelques livres choisis soigneusement par les bibliothécaires, reliés par un fil thématique, leur sont présentés de façon surprenante et soignée et sont prêtés à la classe pour des lectures partagées.
On se voit moins, mais mieux. On comptabilise moins de livres en circulation mais plus de lectures à l’école, à la maison et par ricochet à la bibliothèque. Qui s’en plaindrait ? Le risque est que « les élèves se battent pour les livres » comme me le confiait récemment un enseignant de CM2 qui a goûté à la formule « traiteur » (utilisée aussi dans le voyage-lecture) et qui entend bien continuer.
Le raccourcissement de la semaine scolaire oblige les bibliothécaires à rompre avec les habitudes, à redéfinir des objectifs, à travailler en équipe pour faire enfin une offre alléchante et efficace qui donne du souffle aux lecteurs et crée des liens forts avec les enseignants et les parents.
Véronique Marie LOMBARD (mars 2009)
*Jean–Marie Privat, Actes de lecture, numéro 53, 1996. « L’école un partenaire privilégié » (p. 76-83)